Qu'est-ce que l'autorité ? Conférence de 2009 à Montréal en vidéo sur internet
En avant-première du livre Psychopathologie de l'autorité, compilation de tous les travaux antérieurs d'Ariane Bilheran sur la question de l'autorité, qui paraîtra d'ici 2016 chez Armand Colin, découvrez la conférence sur le sujet donnée le 03 juin 2009 à Montréal, au Québec (Canada).
Le sujet est particulièrement d'actualité, dans une société française qui se laisse progressivement envahir par des retours de chaos et d'obscurantisme. Comprendre est toujours la première marche à franchir pour ne plus être victime.
Qu'est-ce que l'autorité ?
Conférence donnée le 03 juin 2009 au Centre Saint-Pierre, à Montréal (Québec, Canada)
Extrait du prochain livre d'Ariane Bilheran, Psychopathologie de l'autorité
(Paris, Armand Colin, 2016)
"Souvent, il est tenu pour acquis que l’autorité n’est pas tout à fait compatible avec la liberté.
Au contraire, l’autorité augmente l’autonomie, donc la liberté.
La première erreur consiste à croire que la liberté est de faire tout ce que l’on désire. Il ne s’agit pas là d’une liberté, mais d’une aliénation à la satisfaction immédiate, qui ne peut être différée (cf. infra, au sujet du principe de réalité). Cette erreur entraîne un rejet d’autorité et se conforte dans le laxisme. Ici, l’autorité est niée au nom d’une prétendue liberté.
La seconde erreur consiste à nier la liberté au nom de l’autorité. En somme, ainsi que l’indique Hegel (1820, p. 53), l’autorité s’évertue à « trouver la voie moyenne entre une trop grande liberté permise aux enfants, et une trop grande limitation de cette liberté ». La voie moyenne n’est pas simplement un « ni trop ni trop peu », mais la voie d’une juste mesure qui, en changeant de degré (ni trop – autoritarisme -, ni trop peu – laxisme-), change radicalement de nature. Cette définition semble valable non seulement pour l’autorité parentale, mais également pour l’autorité étatique à l’égard des sujets citoyens, pour l’autorité enseignante ou même managériale…
Le laxisme comme l’autoritarisme ont des incidences psychologiques, qui peuvent d’ailleurs engendrer des symptômes identiques de souffrance intime. La philosophie et la psychologie se rejoignent pour dire que la liberté est l’intériorisation de lois morales, dont les irréductibles interdits civilisateurs du meurtre et de l’inceste, qui n’entrent pas nécessairement en contradiction avec le désir, et permettent au contraire de lui donner vie, de le conduire à l’existence, en un plaisir différé mais dont la réalisation est possible dans le respect d’autrui.
L’autonomie est ainsi la capacité de se donner des lois morales à soi-même, sans être l’esclave d’une satisfaction immédiate, qui laisserait ensuite place à l’angoisse (Schopenhauer, 1819). Elle permet à l’autre de développer un équilibre dynamique et mesuré entre principe de plaisir et principe de réalité."